Le contexte archéologique

                       solutréen de la région

 
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Les sites solutréens des vallées de la Creuse et de la Claise

Dès la fin du XIXe siècle, deux préformes de très grandes feuilles de laurier sont découvertes lors de travaux au château de la Guitière, sur la commune de St-Pierre-de-Maillé, en bordure de la Gartempe (Rochebrune 1881, Patte 1944). 

Mais les premiers indices réellement reconnus d’une occupation solutréenne dans le bassin versant de la Creuse sont mis en évidence par les fouilles de l’abri de Monthaud, dans les falaises en calcaire bordant l’Anglin (Breuil  et Clément 1904). Ce site fut de nouveau fouillé par L. Pradel qui mit au jour trois niveaux d'habitats solutréens : le supérieur se caractérisait par des pointes à cran, les deux autres par des feuilles de laurier (Pradel 1967).

Dans la seconde moitié du siècle, d’autres sites sont découverts, au long des vallées de la Creuse et de la Claise, dans les portions de leur bassin versant qui drainent les terrains sédimentaires de la bordure méridionale du Bassin parisien : 

- L'abri des Roches d’Abilly, révéla, parmi une stratigraphie allant du Moustérien au Néolithique, un niveau d'occupation solutréen très perturbé, où furent retrouvés des fragments de feuilles de laurier de différents modules (Bordes et Fitte 1950).

- L'abri Fritsch, aux Roches de Pouligny-Saint-Pierre, présenta plusieurs niveaux solutréens qui permirent une connaissance chronostratigraphique et technotypologique approfondie et nouvelle de la séquence Solutréen moyen-Solutréen supérieur-Badegoulien (Allain et Fritsch 1967, Trotignon 1973,  Allain 1976).

Une des deux feuilles de laurier de la Guitière (photo : Musée Ste Croix de Poitiers)

- A Leugny, fut découverte une feuille de laurier dans un atelier de taille néolithique (Pradel 1986). A Mérigny, une feuille de petit module aurait été trouvée dans un grotte (information Pradel). Aux Riaux, sur un site de plein air en limite du plateau et du versant de la rive droite de la Creuse, fut découvert un unique fragment mésial, portant des stigmates d'impact en pointe de projectile, d'une petite feuille de laurier en silex du Turonien inférieur (Aubry 1991). 

- Les fouilles du site de plein air de Fressignes, découvert par André Rigaud (Pradel 1963), permirent de mettre au jour plusieurs occupations solutréennes successives et de courte durée, interprétées comme des haltes traditionnelles de pêche et de chasse pour des groupes solutréens habitant en aval dans le bassin de la Creuse (Vialou et Vilhena Vialou 1990, 1994). 
Ce gisement est implanté sur les roches métamorphiques des premiers contreforts du Massif central. Ainsi, d’autres environnements que les terrains sédimentaires ont été fréquentés lors d’occupations qui ont laissé de nombreux vestiges (Allain 1976 a et b et 1989). L’hypothèse que la carte de répartition soit la conséquence de la facilité de détection de sites en milieu karstique et corrélativement de la difficulté de repérer ceux de plein air, doit donc être considérée (Aubry et al. s.p.).

Localisation des sites solutréens de la basse vallée de la Creuse, et des affleurements de silex dont sont originaires les matières premières des différents outils retrouvés sur ces sites.

 

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Chronologie et caractères des occupations solutréennes

Dans l’état actuel de nos connaissances, la chronologie absolue des occupations solutréennes de la région se base sur une seule date, obtenue par le procédé C14, à partir d’os brulés provenant de la couche 8d de l’abri Fritsch. Le résultat obtenu, de 19.280 ± 230 B.P., est statistiquement semblable à ceux provenant de sites à pointes à cran du Sud-Ouest de la France.

La reconstitution des faunes chassées et du traitement des ressources animales se base sur les listes fauniques des sites des Roches d’Abilly (Bordes et Fittes, 1950), de Monthaud (Breuil et Clément, 1906) où le cheval et le renne sont les espèces respectivement dominantes. Récemment, l’étude archéozoologique des différents niveaux d’occupation de l’abri Fritsch (Bayle, 2000) a révélé que la chasse du renne était constante, alors que celle du cheval et de la saïga était complémentaire. Cette étude a aussi mis en évidence des comportements récurrents de traitement des carcasses. Les arguments de succession des occupations sur un site invisible depuis le fond de la vallée, la régularité de l’emplacement des accumulations osseuses et des comportements de subsistance ont été avancés pour proposer qu’il s’agit de vestiges d’un même groupe ou de groupes possédant des traditions communes.

Les études litho-technologiques des assemblages solutréens des sites régionaux montrent que les chaînes opératoires de fabrication des pointes à cran et de façonnage des différentes catégories de feuilles de laurier sont incomplètes (Aubry, 1991). 
La sous-représentation des phases initiales du façonnage se vérifie même lorsqu’il existe une matière première à proximité, comme à Monthaud et aux Roches d’Abilly, où une partie seulement des pièces foliacées bifaces a été fabriquée sur place. 
En outre, la comparaison de l’état de fragmentation des pointes à cran du site de Fressignes (Vialou et Vilhena Vialou, 1990 et 1994), avec les données fournies par les études fonctionnelles développées à partir du site de Combe Saunière (Chadelle et al. 1991, Geneste et Plisson, 1986, Geneste et Plisson, 1993), indique que l’accumulation de cette catégorie d’outil résulte majoritairement de l’abandon après utilisation et cassure comme pointes de projectiles, lors d’occupations à vocation cynégétique, et non de rejets d'opérations de taille.
 

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L'approvisionnement en matières premières

L’étude de l’origine des matières premières lithiques des séries solutréennes découvertes dans la vallée de la Creuse (Aubry, 1991) révèle l’exploitation de sources communes de silex.  Les distances de déplacements de ces silex peuvent dépasser 100 kilomètres, même sur des sites où il existe localement des sources (voir plan ci-dessus). Les modalités de déplacement et d’introduction des différents matériaux sur les sites présentent des variations en fonction des disponibilités en silex de l’environnement (Aubry, 1991 ; Vialou et Vilhena Vialou, 1990, 1994).

Cette étude a aussi montré l’utilisation de silex originaires de régions où aucun indice d’occupation pendant le Solutréen n’est encore connu. Celà concerne du silex du Turonien inférieur et de l’Hettangien, provenant du bassin versant du Cher : l’utilisation de ces silex est attestée pendant tout le Paléolithique Supérieur de la région Centre (Aubry, 1991) et sur des sites du Massif Central, distants de plusieurs centaines de kilomètres (Masson, 1981).

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